Les bandes ludiques #12
Dans cet épisode de la série « Si j’étais Maire » nous allons explorer comment donner aux enfants la place qui leur revient de plein droit dans la ville. Tout d’abord il s’agit de reconnaître les enfants comme de véritables citoyens. Car dès leur naissance, les enfants sont des citoyens à part entière. À ce titre, ils ont un droit à la ville, encore trop peu reconnu et visible dans l’espace urbain. Ce droit implique la possibilité d’évoluer en sécurité, d’exister, de se déplacer, de jouer, de s’exprimer et de participer à la vie urbaine.
Voici donc cinq enjeux à prendre en compte pour faciliter la mise en oeuvre opérationnelle de cette politique.
1. La ville à hauteur d’enfant : une politique qui s’affirme depuis peu par petites touches, mais qui manque encore d’ambition et peine à se généraliser. Dans sa grande majorité, la ville reste fondamentalement inhospitalière : on ne peut tout simplement pas lâcher la main d’un enfant de 4 ans dans la rue, révélant un déficit de sécurité, d’autonomie et de confort pour les plus jeunes. Ce refus d’accepter que les rues de nos villes puissent devenir le support privilégié de la vie familiale a pourtant des conséquences économiques délétères : des visites écourtées, moins de consommation, une perte de vitalité commerciale.
2. L’enjeu de l’apprentissage de la citoyenneté reste entier La ville doit être un terrain d’apprentissage pour la citoyenneté. En côtoyant d’autres personnes dans l’espace public, l’enfant apprend la découverte de l’altérité, la cohabitation, la négociation, et l’empathie. Or, les enfants évoluent trop souvent dans des cercles restreints (famille, école) qui sont de l’ordre de la ville du Dedans, éloignés du tissu urbain et des autres usagers. Il s’agit de renforcer leur relation à la ville relationnelle, et en particulier à la ville du Dehors, en renforçant leur relation à leur propre corps en mouvement, ainsi que leur relation aux autres et au vivant.
3. Le manque d’espaces de séjour pour les enfants La ville permet parfois aux enfants d’avancer (circuler), mais rarement de s’arrêter, observer, socialiser ou jouer librement. Les aires de jeux, souvent en marge, à l’écart de la ville ou carrément enclavées dans des espaces sans co-visibilité avec l’espace-rue, sont des sortes de « réserves d’indiens » : des espaces spécialisés qui restent le plus souvent assez peu connectés à la vie urbaine. Cette logique d’exclusion limite leur rôle éducatif et relationnel et ne prépare aucunement les enfants à prendre la pleine possession de leur citoyenneté.
4. Vers une ville plus inclusive avec le levier des "bandes ludiques » Dans notre livre qui vient de sortir sur les cinq leviers de la Ville relationnelle, nous avons proposé comme troisième levier les « bandes ludiques ». Le concept de bande ludique vise à réintégrer les enfants dans les espaces publics du quotidien (rues commerçantes, parvis de piscines ou supermarchés, et simples trottoirs le long des rues les plus banales). Il s’agit de ramener le jeu au cœur de la ville, dans les flux et non en marge, en s’adressant à toutes les tranches d’âge, en particulier les fratries. Ces bandes ludiques sont constituées d’éléments simples, durables et peu coûteux : micro-topographies, dessins au sol, textures variées, mobilier léger, végétation comestible à hauteur d’enfant (vergers, haies fruitières). Elles permettent une occupation spontanée et informelle de l’espace public, sans aménagement lourd.
5. Une ville ludique, sensible et adaptée aux rythmes de vie Plutôt que de placer encore la politique de la ville à hauteur d’enfant dans son silo, l’approche doit être transversale : il s’agit encourager le jeu en tout temps, en tout lieu, y compris le soir et en hiver. L’urbanisme dans sa version nocturne est souvent un impensé qui se révèle particulièrement inhospitalier pour les enfants, alors qu’ils se déplacent aussi dans l’obscurité (sorties d’école, de sport, de musique). Une lumière douce, sécurisante, accueillante est indispensable pour une ville véritablement inclusive. Construire une ville relationnelle, c’est penser l’espace urbain comme un lieu d’interactions, d’apprentissage, de socialisation — et non de contrôle ou d’isolement par une mise à l’écart ou une surspécialisation des espaces dédiés aux enfants. Les bandes ludiques, en tant que dispositifs pleinement intégrés à l’espace-rue qui reste l’ADN premier de nos villes, offrent un levier à la fois simple et puissant pour donner aux enfants leur pleine place dans la ville, et les préparer à y devenir, demain, des citoyens engagés.
Chapitres:
0:00 - Si j'étais maire, je ferais une bande ludique
0:37 - Construire la ville à hauteur d'enfant
1:20 - Mieux accueillir les enfants améliore la vitalité commerciale
2:38 - L’enfant, un citoyen comme les autres
4:41 - Une bande ludique, c’est quoi ?
6:07 - Quels ingrédients faut-il pour la fabriquer ?
7:34 - Accueillir le jeu dans la ville le soir
J'espère que vous avez apprécié cet épisode et que vous y avez récolté de belles inspirations pour vos projets actuels et futurs. Vous retrouverez plus de ressources y compris plein de vidéos avec des cas d'étude intéressants sur les autres playlists de ma chaîne YouTube : https://www.youtube.com/@bfluidproductions
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